Le pays tourne très au ralenti, les motos sont quasiment toutes à l’arrêt. Par effet domino, la filière moto est peu ou prou dans le même état depuis 4 semaines et pour encore un moment. Au sortir du confinement, ça va faire mal.
Vous ne roulez pas. Parce que le confinement vous l’interdit, parce que vous êtes au chômage partiel en activité partielle, parce que ce ne serait de toute manière pas bien prudent. Les raisons sont multiples mais le résultat est le même : vous ne roulez pas. Et les autres motards de France non plus. Et vous vous dites que quand le confinement sera levé, vous irez, comme avant, vous régaler en partant avaler des centaines de kilomètres au guidon de votre machine préférée, après l’avoir remise en route correctement et en prenant certaines précautions. Comme avant, enfin presque.
Parce que le monde de la moto va déguster. Vous ne roulez pas donc vous n’allez pas acheter une nouvelle moto (neuve ou d’occasion), vous n’allez pas dans votre concession habituelle faire faire la révision prévue vu que votre compteur reste bloqué. Vous n’allez pas non plus chez votre équipementier du coin pour acheter un nouveau casque ou blouson. Vous le faites sans doute en ligne mais avouez que sans perspective claire du retour sur la route, l’envie de changer de matériel s’amenuise. Ces secteurs vont donc, mécaniquement, souffrir et tout le monde ne survivra pas parmi les nombreux acteurs.
D’ailleurs, pour limiter les risques, plusieurs marques parmi les plus gros constructeurs moto ont déjà annoncé qu’elles ne seraient pas de la fête sur les prochains gros salons internationaux (Intermot à Cologne, Eicma à Milan). Ce qui met en péril de telles organisations. Paris a d’ailleurs annulé l’édition 2020 de son salon auto/moto mais devant la déception de la précédente édition, pas sûr que ça ait vraiment attristé les constructeurs et fabricants. Mais cette “prudence” va durer quelques années, le confinement ayant démarré à la période habituellement charnière pour que les marques présentent leurs nouveautés (moto ou pneu) à la presse et les lancent sur le marché.
D’ailleurs, pour passer le temps, vous lisez la presse moto. Mais comme les marques n’ont plus d’entrée d’argent, elles limitent grandement toute dépense. Et la pub en est une très importante. Or, sans pub, la presse ne peut pas tenir ; surtout la presse gratuite. C’est un milieu qui tient déjà avec difficulté et, depuis le début du confinement, tout le monde s’observe en espérant ne pas être le premier à flancher. La semaine dernière, un des sites les plus importants a brisé le tabou en écrivant qu’ils allaient devoir « trouver des solutions complémentaires si le confinement venait à se poursuivre au-delà de ce mois d’avril ». Il ne faut pas se leurrer, ils se posent tous la même question et le passage à un modèle payant ne sera plus une hypothèse de travail mais un nécessaire à la survie pour la majorité. Même les très gros du secteur, comme ceux appartenant au groupe Larivière risquent de devoir une fois de plus s’adapter car avec tous ces championnats annulés ou reportés, les entrées d’argent en baisse imposeront des choix.
Car ça n’aura échappé à personne, il y a eu un peu de rififi au niveau des calendriers. Celui du MotoGP est tellement bouleversé que l’année blanche est en train de devenir la solution qui donnera le moins de cauchemars aux diférentes écuries et en Superbike, on prend le même chemin. Pour éviter d’en arriver là, l’Endurance frôle le n’importe quoi, avec deux Bol d’or dans la même saison dont un situé à moins d’un mois des 24 Heures du Mans. Mais il ne faut pas oublier les championnats nationaux (piste, rallye ou offroad) et tous les roulages organisés par diverses structures qui risquent, là encore, de boire le bouillon, la saison étant clairement foutue.
La moto a beau être une passion, elle reste un loisir pour beaucoup de pratiquants. Et en temps de crise, quand on voit son salaire se réduire, entre manger et changer les pneus de la moto, le choix est logique. Il est difficile de savoir à quoi va ressembler l’après-covid19 mais il est certain que le monde de la moto ne sera plus le même car tous les acteurs sont touchés. Les plus gros ne sont pas forcément les plus solides mais aucun maillon n’est à négliger.
Et les plus beaux des maillons, ce sont tous ces motards qui, une fois qu’ils le pourront, repartiront s’évader sur leur moto. Parce que, finalement, le meilleur moyen de garder la raison, c’est de vivre sa passion. Le reste se reconstruira ; différemment sans doute mais il se reconstruira.